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Burkina Faso : Roch Kaboré, de l'espoir de changement au chaos sécuritaire

Roch Marc Christian Kaboré, président du Burkina Faso investi samedi par son parti pour briguer à 63 ans un deuxième mandat à la présidentielle de novembre, a incarné l'espoir d'un changement, mais sous sa gouvernance le pays a sombré dans les violences jihadistes. 

Crédit Photo : Ludovic MARIN
Crédit Photo : Ludovic MARIN

Le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré le 30 juin 2020 à Nouakchott lors d'un sommet des pays du G5 Sahel.

En 2015, un an après la chute de Blaise Compaoré, renversé par une insurrection populaire après 27 ans de pouvoir, l'élection de Roch Kaboré dès le premier tour (avec 53,49% des voix) avait suscité de grands espoirs de développement et de changement "au pays des hommes intègres".

Homme de consensus, cet ancien banquier avait su rassembler aussi bien des anciens du régime que ses opposants, les paysans d'un pays très rural mais aussi les citadins des grandes villes, Ouagadougou et Bobo Dioulasso. Il était pourtant un ancien baron du système Compaoré, qui avait changé de camp juste avant la chute du régime, ses adversaires le taxant d'ailleurs d'opportunisme.

Cinq ans plus tard, le Burkina Faso s'est enfoncé dans le chaos avec des attaques de groupes jihadistes quasi quotidiennes, ayant fait plus de 1.100 morts en cinq ans, des pans entiers du pays échappant à l'autorité de l'Etat, les forces de l'ordre semblant incapables d'enrayer la spirale de violences. Face à cette situation catastrophique, les discours du président Kaboré apparaissent quelque peu surréalistes, multipliant les annonces de victoires alors que les attaques s'enchaînent, et usant de grandes envolées patriotiques qui paraissent d'un autre siècle.

Son parti, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), fait valoir son bilan, citant les réalisations en matière d'infrastructures routières, de santé et d'accès à l'eau potable, semblant là encore en complet décalage avec la réalité: un million de personnes ont dû fuir leurs foyers à cause des violences jihadistes, et des milliers d'écoles ont dû fermer, privant les enfants d'éducation. Roch Kaboré "est une sorte de roi fainéant qui multiplie les audiences et écoute dans son fauteuil sans prendre de décision", estime une source diplomatique à Abidjan. Selon des sources sécuritaires, le régime Kaboré, craignant un putsch, n'a pas "donné à l'armée les moyens de répondre" aux jihadistes.

Manque de poigne 

Homme d'appareil perçu comme "intelligent et cohérent", ayant occupé les plus hautes fonctions sous le régime Compaoré, M. Kaboré est reconnu pour ses qualités d'organisateur, mais manque de poigne selon ses détracteurs, qui le disent dépassé par la situation. Issu de l'ethnie majoritaire mossi, catholique pratiquant dans un pays à majorité musulmane, l'homme au physique imposant est un personnage affable et un bon vivant, selon ses proches. Il aime s'habiller de vêtements traditionnels, boubou bazin ou Faso Danfani.

Fils de ministre, "né avec une cuiller d'argent dans la bouche" affirment ses détracteurs, il avait adhéré dans sa jeunesse à des idéaux de gauche après son retour d'études en France. Dans les années 1980, il profite de l'accession au pouvoir de Thomas Sankara, le père de la révolution d'inspiration marxiste, pour devenir directeur de la Banque internationale du Burkina, avant même son trentième anniversaire. Après l'assassinat de Sankara en 1987, Compaoré prend le pouvoir et Roch accomplit une carrière fulgurante auprès du "Beau Blaise". Plusieurs fois ministre, il devient un des personnages clés du régime, occupant les fonctions les plus prestigieuses comme Premier ministre, période pendant laquelle il gère la dévaluation historique du franc CFA, ou président de l'Assemblée nationale. 

Il occupe aussi le poste stratégique de président du Congrès pour la démocratie et le Progrès (CDP), le parti-Etat qui remporte tous les scrutins. Considéré comme le plus probable successeur de Compaoré, M. Kaboré tombe brutalement en disgrâce en 2012 pour des raisons obscures. Il claque ensuite la porte du CDP en janvier 2014 pour fonder le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), d'obédience sociale-démocrate, avec d'autres anciens caciques du régime. Cette disgrâce sera son tremplin vers l'élection présidentielle de 2015. Malgré le désastre sécuritaire, Roch Kaboré paraît bien parti, selon les observateurs, pour rester à la tête du Burkina Faso, face à une opposition qui part au scrutin présidentiel en ordre dispersé, sans leader évident.

LSI AFRICA avec l'AFP

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