INQUIÉTUDE
Cryptomonnaies : un rapport alerte sur les risques en République centrafricaine
À l’approche d’échéances électorales cruciales, la stratégie numérique de la République centrafricaine suscite de vives inquiétudes. Un rapport d’experts internationaux alerte sur les risques liés aux programmes de cryptomonnaie mis en place par les autorités, pointant une gouvernance jugée opaque et des vulnérabilités accrues face aux réseaux criminels transnationaux.
- Société

Crédit Photo : DT
Faustin Archange Touadera.
À moins de deux semaines de l’élection présidentielle prévue le 28 décembre, la République centrafricaine se retrouve sous le feu des critiques concernant sa politique en matière de cryptomonnaies. Un rapport publié mercredi par la Global Initiative Against Transnational Organized Crime (GI-TOC) met en garde contre des dispositifs numériques jugés insuffisamment encadrés, susceptibles d’exposer les ressources publiques à des captations illicites. Le président Faustin-Archange Touadéra, candidat à un troisième mandat, a fait du numérique et des monnaies virtuelles un axe central de sa gouvernance depuis son arrivée au pouvoir en 2016. En 2022, la République centrafricaine est devenue le premier pays africain à reconnaître le bitcoin comme monnaie légale, une décision présentée par les autorités comme un levier de modernisation économique et de financement alternatif des infrastructures.
Selon le rapport du GI-TOC, cette orientation s’est traduite par la mise en place de projets manquant de mécanismes de transparence et de contrôles robustes contre le blanchiment de capitaux. L’organisation estime que ces initiatives profiteraient principalement à un cercle restreint d’acteurs, tout en offrant des opportunités à des groupes criminels cherchant à recycler des fonds à l’échelle internationale. Le gouvernement centrafricain n’a pas officiellement réagi aux conclusions du rapport. Un haut responsable, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a toutefois rejeté ces accusations, évoquant une tentative de discrédit politique. Selon lui, ces projets sont défendus comme une alternative aux circuits bancaires traditionnels, jugés restrictifs et peu accessibles dans le contexte centrafricain.
Le rapport se concentre notamment sur deux initiatives emblématiques. La première, Sango Coin, avait été présentée par le chef de l’État comme un projet structurant destiné à transformer Bangui et à attirer des investisseurs étrangers, en associant cryptomonnaie, infrastructures et avantages tels que la résidence électronique ou l’accès au foncier. Mais ces dispositifs ont été partiellement invalidés par la Cour constitutionnelle dès août 2022. Le projet n’a jamais atteint ses objectifs financiers, ne parvenant à écouler qu’une fraction des jetons initialement proposés, pour un montant inférieur à 2 millions d’euros en un an. En avril dernier, ses promoteurs ont annoncé un changement de cap, sans préciser le sort des fonds engagés.
La seconde initiative, lancée en février, repose sur une meme coin baptisée $CAR, conçue pour accroître la visibilité internationale du pays et soutenir le développement. Le lancement a toutefois été marqué par des dysfonctionnements techniques, dont la suspension rapide de son site Internet. Si cette cryptomonnaie a ensuite été utilisée dans des transactions liées à des terrains numérisés, le rapport indique qu’aucun élément ne permet d’établir un bénéfice direct pour les finances publiques. Au-delà de ces projets, la GI-TOC alerte sur les intentions affichées d’étendre ces mécanismes à des concessions minières, sans dispositifs suffisants de vérification d’identité ni garanties contre les flux financiers illicites. Une telle évolution pourrait, selon le rapport, exposer les réserves nationales de diamants, d’or ou de pétrole à des acquisitions par des acteurs criminels opérant à l’échelle internationale.
Classée parmi les pays les plus pauvres du monde et marquée par des décennies d’instabilité depuis son indépendance en 1960, la République centrafricaine aborde ainsi son scrutin présidentiel dans un climat où les choix économiques et numériques du pouvoir font désormais l’objet d’un examen accru.
LSI AFRICA avec Reuters
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