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PRÉSIDENTIELLE

Côte d'Ivoire : Henri Konan Bédié, le sphinx de Daoukro

Surnommé le "Sphinx de Daoukro", son fief dans le centre de la Côte d'Ivoire, l'ancien chef d'Etat Henri Konan Bédié, l'homme de "l'ivoirité", concept nationaliste voire xénophobe, veut ses revanches pour redevenir président, malgré son âge avancé, 86 ans. 

Crédit Photo : AFP
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Henri Konan Bedié, ancien président de la Côte d'Ivoire.

Revanche contre le président Alassane Ouattara qui aurait trahi sa parole, revanche contre le putsch qui l'a renversé en 1999, revanche enfin contre ceux qui l'accusent de ne pas avoir su gérer l'héritage du "père de l'indépendance" Félix Houphouët-Boigny. Aujourd'hui, en l'absence de Laurent Gbagbo et Guillaume Soro, "HKB" est le principal opposant en lice face à Alassane Ouattara, qui brigue un troisième mandat controversé. L'octogénaire, qui a su décourager toutes les tentatives de jeunes générations de le remplacer au sein de son parti, promet une "victoire qui permettra aux jeunes de Côte d'Ivoire d'accéder aux responsabilités pleines et entières". Né le 5 mai 1934 dans le village de Dadiékro (centre) au sein d'une famille de planteurs de cacao, "HKB" se veut l'héritier et le successeur d'Houphouët-Boigny, d'ethnie baoulé comme lui.

Ambassadeur à 26 ans, ministre de l'Economie à 32 ans, M. Bédié, dont la carrière avait connu un coup d'arrêt à cause d'accusations de corruption, a su surmonter ces problèmes pour s'imposer comme le dauphin naturel d'Houphouët-Boigny et contrôler sans partage le mouvement fondé par son aîné, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI).  Il lance à ce moment le concept de l'ivoirité pour écarter de la course à la présidence un certain Alassane Ouattara, dit "ADO", accusé d'être Burkinabè. Aujourd'hui encore, HKB s'aventure régulièrement sur ce terrain en fustigeant "les étrangers".  Elu président en 1995 sans grande concurrence il surfe sur le nationalisme mais sa présidence, minée par la corruption, s'effondre en quelques heures à Noël 1999 face à une mutinerie de soldats qui se transforme en putsch, le premier de l'histoire du pays.

"C'est à l'image de sa présidence, une période d'endormissement. Aujourd'hui, il veut sa revanche sur ce putsch mal géré. Et sur Ouattara, qu'il a soutenu (en 2010 et 2015) mais qui n'a pas selon lui respecté son engagement de lui redonner le pouvoir (en 2020). Mais surtout, il ne veut pas rester dans l'Histoire comme celui qui a perdu le pouvoir du PDCI d'Houphouët", estime un observateur.

"Roulé dans la farine" 

"Il est responsable de tous les maux de ce pays", assure sous couvert de l'anonymat un spécialiste de la communication. "C'est lui qui a introduit le ver de l'ivoirité dans le fruit. Maintenant, il y a des violences intercommunautaires fréquentes. Il a humilié les militaires en refusant de les recevoir. Désormais il y a des mutineries à répétition. Il est aussi le symbole de l'immobilisme". Amateurs de cigares et de bons vins, HKB, que beaucoup décrivent comme "très près de ses sous", s'était rapproché de son ancien ennemi Alassane Dramane Ouattara en 2005 pour créer le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), alliance électorale entre le parti de Ouattara et le PDCI. Troisième de la présidentielle de 2010 derrière Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, Bédié tient son engagement et soutient activement ce dernier pendant toute la crise post-électorale (2010-2011) qui a fait près de 3.000 morts en quelques mois.

Après une lune de miel avec le chef de l'Etat, qu'il soutient encore à la présidentielle de 2015 (Ouattara a même fait baptiser le troisième pont d'Abidjan du nom de Bédié), HKB s'est à nouveau brouillé avec ADO en 2018, justement à cause de la présidentielle. Le Sphinx assure que M. Ouattara s'était engagé à soutenir un candidat PDCI en 2020, en échange du soutien de son parti en 2015. "Les promesses ne concernent que ceux qui y croient. ADO l'a roulé dans la farine", souligne un député PDCI, sous couvert de l'anonymat, qui aurait voulu que "Papy laisse la place".  Toutefois, un cadre voit en HKB "un fin tacticien qui a traversé toutes les tempêtes" et a su convaincre "les jeunes loups" du PDCI de le soutenir à nouveau.

Patrick FORT

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