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ROMAN

Roman: Dali Misha Touré, "J’ai grandi entourée de familles polygames"

Faisant fi des étiquettes, Dali Misha Touré est bien décidée à s’imposer dans le paysage littéraire français. Dans son roman Cicatrices, l’écrivaine aborde avec sensibilité la question épineuse de la polygamie en France.

Crédit Photo: Hamed Welkin
Crédit Photo: Hamed Welkin

Dali Misha Touré est l'auteure de Cicatrices.

Quand on rencontre Dali Misha Touré pour la première fois, on est frappé par le mélange de délicatesse et de force qui émane d’elle. Sourire aux lèvres et regard vif, elle nous reçoit dans son appartement d’Aulnay-sous-Bois. A 25 ans, 5 enfants, 1 (seul) mari, des études de psychologie et 4 livres auto-publiés à son actif, l’auteure ne chôme pas.


Tout commence en 2010. Alors âgée de 15 ans, elle frappe à la porte d’une librairie du centre d’Aulnay. Grâce au soutien de la mairie et à l'aide de sa prof de français, elle publie elle-même un manuscrit qu'elle rédige dans sa chambre en deux mois. Dix-mille exemplaires vendus plus tard, Cicatrices, est édité cette année chez Hors d’Atteinte, une maison d’édition féministe basée à Marseille. 

Dans ce récit poignant, elle décrit sans manichéisme, l’horreur, la complexité, mais aussi les moments de grâce d’un quotidien marqué par la violence dans une famille malienne polygame de banlieue parisienne. L’histoire d’une renaissance, après une enfance perdue entre les coups, la promiscuité et le manque d’amour.

Le style brut, direct et le texte rédigé à la première personne donne l’impression que la narratrice est Dali Misha Touré. Ce qu’elle dément : « J’ai grandi entourée de familles polygames et j’avais très envie d’en parler. On peut écrire profondément sur quelque chose qu’on a pas vécu »

Comme son personnage, elle est musulmane, d’origine malienne, vit dans un quartier populaire et se passionne pour l’écriture. Mais contrairement à elle, Dali a grandi dans une famille aimante de sept enfants. Son père exerce la profession d’éboueur et sa maman est mère au foyer. « Ils m'ont toujours soutenue », raconte Dali.

En brouillant à dessein les pistes, l’écrivaine interroge l’imaginaire collectif : « On suppose toujours que ce récit est autobiographique, pourquoi ne pourrais-je pas faire de la fiction comme n’importe quel écrivain ? ».

Rivalité, jalousie, asservissement

Du monument de la littérature Une si longue lettre de Mariama Bâ, aux séries Big Love aux Etats-Unis et Maîtresse d’un homme marié, véritable phénomène de société au Sénégal, la polygamie inspire de nombreuses oeuvres. Cicatricesse distingue en abordant la thématique du point de vue d’un enfant.

Rivalité entre co-épouses, jalousie, absence d’intimité, asservissement de la femme… Ici, aucun aspect négatif de la polygamie n’est occulté. Pour autant, la narratrice ne juge jamais ses parents, elle se contente simplement de décrire sa vie et son ressenti. « Je voulais axer le récit autour de la non communication car beaucoup de souffrances en découle », précise Dali. 

Caricature de la polygamie ?

Malgré ces précautions, sa plume réaliste lui vaut des critiques de la part de personnes concernées. On lui reproche de caricaturer et de donner une mauvaise image de la polygamie. Face à ces attaques, Dali nuance : « Dans certaines familles cela se passe très bien et les mères sont très proches. La maltraitance a lieu dans tous les milieux, pas seulement les familles polygames. » En France, la polygamie est interdite par la loi. Depuis 1993, l’Etat ne délivre d’ailleurs plus de titre de séjour aux étrangers polygames.

Un rapport de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), estime toutefois qu’il y aurait entre 16 000 et 20 000 familles polygames en France. Environ 80% d’entre elles, seraient originaires du Mali.

Polygamie, polygynie, polyandrie

La polygamie désigne un régime matrimonial dans lequel un individu est lié, en même temps, à plusieurs conjoints. La polygamie féminine (une femme avec plusieurs maris), s’appelle la polyandrie. La polygamie masculine (un homme avec plusieurs épouses) se nomme la polygynie. Cette dernière est la plus répandue, principalement pour des raisons religieuses. A l’exception de la Turquie et de la Tunisie, les pays musulmans autorisent la polygynie car l’islam permet aux hommes d’avoir jusqu’à quatre femmes à l’instar du prophète Mohamed. Des pays africains à majorité chrétienne l’autorise également comme la RDC. L’Afrique du Sud et l’Inde ne l’autorisent pas mais tolèrent néanmoins sa pratique. La polygamie est interdite aux Etats-Unis, en Europe, en Amérique du Sud et dans la majorité des pays asiatiques.

En 2009, une note intitulée La polygamie en France : une fatalité est publiée par l'Institut Montaigne. Son auteure, Sonia Imloul, ancienne militante associative en Seine-Saint-Denis considère que « la polygamie constitue un danger pour l’organisation sociale dans les territoires où elle est particulièrement concentrée » et de dénoncer « son caractère destructeur pour les femmes et les enfants qui la subissent »

Avec l'AFP

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