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HISTORIQUE

RDC : Kamerhe acculé, plus de 260 députés exigent sa destitution

Vital Kamerhe vacille au perchoir : lâché par plus de 260 députés, dont une partie de sa propre majorité, le président de l’Assemblée nationale est désormais pris dans une tourmente politique inédite. Accusé d’opacité financière, de mépris envers le personnel parlementaire et de liens troubles avec Joseph Kabila et Paul Kagame, il fait face à une contestation d’une ampleur historique qui pourrait signer sa chute définitive.

Crédit Photo : DT
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Une majorité écrasante

La présidence de l’Assemblée nationale congolaise traverse une zone de turbulences sans précédent. Vital Kamerhe, longtemps présenté comme un stratège politique et un artisan du compromis, se retrouve aujourd’hui isolé, contesté et menacé par une procédure de destitution lancée par une coalition de députés pétitionnaires. Une majorité écrasante de plus de 260 élus a déjà signé le document réclamant son départ, dépassant largement le seuil légal de 125 signatures. Ce chiffre, à lui seul, illustre l’ampleur de la rupture : pour la première fois, une telle mobilisation inclut un nombre significatif de députés issus de sa propre majorité, un signal fort qui traduit l’érosion de son autorité au sein même de son camp.

Excuses publiques et bureaux fermés

Le lundi 15 septembre, en séance plénière, Kamerhe a tenté d’enrayer cette dynamique par un geste d’humilité. Reconnaissant que ses paroles ou son comportement avaient pu heurter, il a présenté des excuses publiques à ses collègues, les exhortant à préserver l’unité de l’institution face aux menaces extérieures. Mais cette démarche, empreinte de gravité, n’a pas convaincu. Pour Crispin Mbindule, figure de proue de la contestation, ces excuses sonnent comme un aveu. « Demander pardon, c’est reconnaître la faute », a-t-il déclaré, ajoutant que rien, dans le règlement intérieur, n’impose l’arrêt d’une telle procédure. Les pétitionnaires restent donc déterminés à aller jusqu’au bout, convaincus que la gestion de Kamerhe a franchi un seuil d’irrégularité et de mépris intolérable. L’épisode a même pris une tournure inédite : l’administration parlementaire a subitement fermé ses portes le jour du dépôt, laissant planer le soupçon d’une manœuvre dilatoire. Mais la détermination des signataires a prévalu : la pétition a été enregistrée au secrétariat général, et une commission spéciale chargée de l’examiner a été mise en place, marquant une première victoire symbolique des contestataires.

Tableau noir de la gestion

Les griefs formulés contre Vital Kamerhe sont nombreux et détaillés. Les députés dénoncent une gestion financière opaque, un manque de transparence dans l’utilisation des fonds publics et une accumulation de dépenses jugées extravagantes. Ses voyages fréquents, entourés de délégations pléthoriques, alimentent les critiques dans un contexte de finances parlementaires exsangues. À cela s’ajoute une productivité législative jugée faible, renforçant l’idée d’un Parlement paralysé. Autant d’éléments qui nourrissent la colère des élus et confortent la procédure de destitution.

L’ombre de Joseph Kabila et de Paul Kagame

Mais au-delà de la gestion, ce sont les soupçons politiques qui minent davantage la position de Kamerhe. Il est accusé d’entretenir des liens ambigus non seulement avec Paul Kagame, mais surtout avec l’ancien président Joseph Kabila, considéré par beaucoup comme l’« ennemi » du régime actuel. Ces relations, réelles ou supposées, jettent le doute sur sa loyauté envers Félix Tshisekedi, au moment où la RDC fait face à une rébellion armée soutenue par le Rwanda. Plusieurs sources proches de l’armée affirment que Kamerhe resterait en contact discret avec des figures de l’ancien régime, une attitude perçue comme une trahison dans une période où l’unité nationale est cruciale. Ces soupçons, alimentés de l’intérieur même de sa majorité, donnent du crédit à l’idée d’un double jeu politique.

Une chute annoncée

La trajectoire de Vital Kamerhe apparaît comme l’aboutissement d’un long processus de désillusion. Celui qui fut perçu comme un négociateur habile et un homme de compromis est aujourd’hui décrit comme autoritaire, distant et coupé de ses collègues. Ce contraste alimente le sentiment d’une trahison politique, renforcé par le souvenir de son éviction en 2009 sous Joseph Kabila, une humiliation qu’il pourrait revivre seize ans plus tard. La différence est de taille : cette fois, ce ne sont pas ses adversaires d’hier qui réclament sa tête, mais ses propres soutiens d’aujourd’hui, unis dans une mobilisation jugée « extraordinaire » et révélatrice d’un malaise profond. Plusieurs témoignages rappellent d’ailleurs qu’en 2019, lors de l’investiture de Félix Tshisekedi, Paul Kagame avait déjà prévenu son successeur de se « méfier » de Vital Kamerhe. Un avertissement qui résonne aujourd’hui comme une prophétie.

Avenir en pointillés 

L’avenir du président de l’Assemblée nationale semble désormais suspendu à une procédure qui paraît difficilement réversible. Ses excuses publiques n’ont pas apaisé la contestation, et la dynamique enclenchée par les pétitionnaires semble irrésistible. Dans un Parlement où les alliances se font et se défont à grande vitesse, le cas Kamerhe illustre à quel point la confiance politique, une fois rompue, est presque impossible à restaurer. Pour une majorité d’élus, la page est déjà tournée : Vital Kamerhe, autrefois figure centrale du compromis politique, n’incarne plus qu’une présidence à bout de souffle, vouée à céder sous la pression conjuguée de ses propres alliés et de ses adversaires

De notre correspondant à Kinshasa

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