Soudan–Russie : Khartoum propose une base navale à Moscou pour 25 ans

Selon des informations publiées par le Wall Street Journal, la proposition aurait été transmise à la Russie en octobre. Elle viendrait préciser et élargir un protocole d’entente signé en 2020 portant sur la construction d’une installation navale. Le nouveau texte ajouterait des conditions détaillées concernant la location du site et les contreparties militaires attendues par Khartoum.

Une base stratégique pour Moscou

D’après les éléments rapportés, la base pourrait accueillir jusqu’à quatre bâtiments militaires russes, y compris des navires à propulsion nucléaire. Environ 300 personnels déployés sur place bénéficieraient d’un statut comparable à l’immunité diplomatique. L’accord mentionnerait également un accès prioritaire de la Russie à certains permis miniers au Soudan, troisième producteur d’or du continent. Le site en question se situe à proximité du canal de Suez, passage par lequel transite près de 12 % du commerce mondial. Une présence militaire permanente offrirait à Moscou un point d’appui majeur pour surveiller les flux entre l’Europe et l’Asie. Les États-Unis et la Chine disposent déjà de bases navales à Djibouti, consolidant eux aussi leur implantation autour de la mer Rouge.

Des demandes d’armement en échange

En contrepartie, la junte soudanaise solliciterait la fourniture de systèmes de défense antiaérienne et d’équipements militaires sophistiqués, proposés à des prix inférieurs aux tarifs habituels. Un haut responsable soudanais cité par le WSJ reconnaît que cet accord pourrait détériorer les relations déjà fragiles du pays avec Washington et Bruxelles, tout en soulignant que « les besoins en armement sont devenus critiques ». Depuis le déclenchement du conflit en avril 2023 entre les Forces armées soudanaises (SAF) du général Abdel Fattah al-Burhan et les Forces de soutien rapide (RSF) du général Mohamed Hamdan Dagalo, les combats ont fait environ 150 000 morts et provoqué le déplacement de 12 millions de personnes, l’une des pires crises humanitaires de la décennie. Les affrontements ont encore gagné en intensité après la prise d’El-Fasher, capitale du Darfour-Nord, par les RSF, dernier centre urbain majeur de l’ouest encore sous contrôle gouvernemental.

Moscou en quête d’influence

Longtemps accusée de soutenir les RSF via le groupe de mercenaires Wagner, la Russie aurait récemment réorienté son appui vers les forces régulières, alors que les paramilitaires auraient, selon plusieurs sources, tenté de se rapprocher de l’Ukraine. Pour Mark Hicks, ancien commandant américain des opérations spéciales en Afrique, un tel accord constituerait un atout majeur pour Moscou : « Une implantation navale permanente en Afrique renforcerait la stature internationale de la Russie et élargirait considérablement son champ d’influence. »